Le Processus d'individuation de C.G JungComme toujours, j’écris à partir de ma propre lecture de Jung qui plonge aussi et surtout dans l’expérience de la personne que je suis et de tous les accompagnements que je fais depuis une trentaine d’années.
Lorsque dans le Dialogue Intérieur, nous nommons le «Moi prenant Conscience », il s’agit d’un processus identique à celui d’individuation. Cela utilise un autre langage pour signifier ce processus de conscience primordial, si l’on veut agir et non réagir, être et non paraître … et chacun de ces langages peut parler plus ou moins à chacun-e.
Souvent, cette « quête » pour aller vers son âme, son unicité, commence après une petite ou grande épreuve, voire un choc traumatique et c’est pour cette raison que j’aime mettre en lien « épreuve » et « miracle » car si l’épreuve n’est ni rejetée ni niée, elle peut devenir ce miracle de nous voir autrement, et donc, plus justement. C’est pour cela que Jung voyait la dépression tel un cadeau aussi. Je ne dis rien d’autre que ce qui a déjà été dit mais je suis témoin de cette vérité et je vous la propose en tant qu’expérience à vivre la prochaine fois qu’une épine se plante dans votre vie (la vie n’est pas avare de ce genre d’expériences :-)).
J’ai souvent dit que je ne souffrais pas, que je n’avais pas souffert (les mots de conclusion aussi de ma psy jungienne au terme de mon analyse), je l’ai souvent ressenti comme quelque chose qui me différenciait de beaucoup, voire qui m’infériorisait car je ne savais pas ce qu’était la souffrance en quelque sorte. Et pourtant, paradoxalement, je comprenais très facilement la souffrance qui se montrait en face de moi, chez l’un-e ou l’autre, et je ne voulais rien d’autre que d’être à son contact pour la rendre consciente aux yeux de l’autre, sans en avoir aucunement peur. Je peux dire aujourd’hui que toujours cette formule magique « épreuve = miracle » était sous-jacente en moi. Tout ce qui venait sous forme d’épreuve, se transformait en élan de conscience et ma curiosité du fonctionnement de l’être humain était comblée. Dès lors, je n’appelais pas « souffrance » ce que je vivais car ce n’est pas ainsi que je vivais cette expérience de l’ombre. Ce petit paragraphe pour nuancer les propos de Jung qui va parler principalement de la souffrance comme l’aiguillon nécessaire à l’individuation. Longtemps, je n’ai pas pu le dire aussi clairement et sans me cacher de ma « non-souffrance », je ne claironnais pas cependant cette différence dans les milieux psy divers, au risque d’être jugée inutilement. Maintenant, je sais y mettre des mots clairs.
Le processus d’individuation, c’est aussi cela : voyager avec une de nos problématiques (même si elle se pose par exemple, pour la mienne, en ces termes originaux : « je ne souffre pas et c’est suspect pour beaucoup et à mes yeux aussi du coup») et avec le temps et la persévérance, cela change, jusqu’à ne plus être une question, une énigme. Elle est résolue presqu’à notre insu, tout en ayant pris soin, toujours, d’être avec elle, de dialoguer avec elle. En tout cas, pour moi, cette problématique m’a fait découvrir des trésors et si je n’avais pas voyagé ainsi avec elle durant toutes ces années où elle m’a accompagnée, si je ne m’étais pas mise en recherche, il y a bien des expériences très riches qui m’auraient échappées. Et souvent, à la suite ou en même temps, une autre problématique s’actualise pour être alors vue à son tour et ce dialogue incessant entre notre conscient et notre inconscient nous amène au plus proche de notre âme. Toute problématique, toute épreuve a ce potentiel : nous faire nous découvrir dans ce qui est de plus intime, de plus inconscient.
Jung est « descendu » dans ses profondeurs, il s’est « confronté » avec l’inconscient (c’est en terme de « confrontations » qu’il en témoigne), poussé par une exigence intérieure qui le rendait tel un explorateur de la psyché humaine. Essayer de se comprendre mais plus largement, de comprendre la psyché humaine a été son élan de vie. Et découvrir Jung et son insatiable besoin de dialoguer avec l’inconscient a été une révélation pour moi. A ma manière, je suis aussi une exploratrice mais sans sa pensée très construite et son besoin de théoriser. Témoigner, échanger, le vivre, oui !!! Cependant, Jung n’est de loin pas qu’un savant, il est aussi un homme qui rêve, joue, dessine, peint, écrit, qui dialogue avec des énergies en lui de toutes ces façons, et c’est grâce à lui que le « Voice Dialogue » ou « Dialogue Intérieur » est né, tel qu’il a été conçu par Hal et Sidra Stone à sa suite.
Le processus d’individuation nous incite ainsi :
- A reconnaître notre persona, ce masque qui nous protège et qui nous permet de vivre (normalement) mieux ensemble mais qui peut devenir un rôle qui nous colle et nous empêche d’être authentique déjà avec nous-mêmes,
- A visiter notre ombre, ce qui a été refoulé comme ce qui n’est pas encore venu à notre conscience, pour nous rendre plus spacieux, - A rencontrer notre anima (le féminin chez l’homme) ou notre animus (le masculin chez la femme) afin de se vivre complet, sans besoin excessif d’un autre,
- A dialoguer avec les archétypes tels l’enfant, le sage, pour s’appuyer sur notre propre sagesse intérieure, sur notre innocence, sur notre enthousiasme,
- A ouvrir son cœur au divin en nous afin de sentir « Dieu de l’intérieur » pourrait on dire, et mieux discerner ce qui est juste pour nous parmi toutes les vérités proclamées.
Jung est un bel exemple de l’individu qui cherche son âme pour lui donner toute sa place afin qu’elle puisse se manifester dans ce monde. Il n’a pas hésité à y consacrer sa Vie. Merci aussi à Emma Jung, sa femme, qui lui a permis de ne pas être trop assujetti à tout l’aspect matériel de la vie.
Être de plus en plus proche de soi, de son âme, de son inconscient, c’est aussi automatiquement, être au plus proche de l’autre et de l’Autre (le divin, le Soi …).
Il y avait mille et une façons de parler de l’individuation. Je ne m’attendais pas à celle-là. Je me suis laissée surprendre … ce qui est le sens du mot « Emerveillance », alors tout va bien :-)
Nathalie